La commission Bibliothèques Vertes de l’Association des Bibliothécaires de France (ABF) vous propose aujourd’hui, à travers ce billet rédigé par Isabelle Bontemps et Julie Curien, un tour d’horizon d’un nouvel outil cadre publié par des établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche (ESR) depuis 2024, et de la manière dont il traite les enjeux de transition écologique en particulier : le Schéma directeur Développement Durable & Responsabilité sociétale et environnementale (DD&RSE).
Nous vous proposons ici un focus réalisé à partir d’une sélection aléatoire parmi les schémas directeurs DD&RSE publiés sur les sites web de plusieurs universités françaises. Notre article se décline en trois parties :
- Une présentation générale du cadre de l’outil
- Une analyse macro des schémas directeurs constituant notre échantillon, avec un focus sur la place des bibliothèques dans ces documents
- Des propositions de pistes pour rendre plus visibles les axes de travail portés par les bibliothèques
L’échantillon sur lequel se fonde ce billet comprend les schémas directeurs des établissements suivants : Université d’Artois 2025-2030 ; Université Caen Normandie 2023-2026 ; La Rochelle Université 2025-2030 ; Université Claude Bernard Lyon 1 2025-2035 ; Université Paris Cité 2025-2030 ; Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne 2024-2028 ; Université de Strasbourg 2024-2027 ; Toulouse Jean Jaurès 2025-2030.
Schéma Directeur DDRSE : présentation du cadre de l’outil
La publication du rapport intitulé « Sensibiliser et former aux enjeux de la transition écologique et du développement durable dans l’enseignement supérieur » par Jean Jouzel et Luc Abbadie en février 2022, suivi de la parution du Plan climat-biodiversité et transition écologique de l’Enseignement supérieur et de la Recherche en novembre 2022 ont successivement traduit la volonté ministérielle forte de conduire une véritable politique nationale de transition écologique dans les établissements d’enseignement supérieur et de recherche.
A la suite de ces deux textes fondateurs, les chefs d’établissements ont ainsi été invités à rédiger un schéma directeur « Développement Durable – Responsabilité Sociétale et Environnementale » (SD DD&RSE) pour se doter d’un document stratégique sur ces questions et élaborer un plan d’actions concret.
Concernant la mise en forme de cet engagement, le Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche a produit en juin 2023 un document détaillé précisant à la fois les principes d’un SD DD&RSE, son contenu et son pilotage. Ce document impose plusieurs thématiques à aborder obligatoirement (décarbonation des activités, sobriété énergétique et impact environnemental) et cinq axes dans lesquels inscrire les différentes actions :
- Stratégie et gouvernance
- Enseignement et formation
- Recherche et innovation
- Réduction de l’impact environnemental
- Politique sociale et qualité de vie au travail
C’est dans ce cadre assez contraint que les établissements d’enseignement supérieur ont formalisé, pour la fin de l’année 2024 au plus tard, leurs ambitions en termes de transition écologique.
Analyse d’après échantillon
Nous partageons avec vous notre lecture et analyse des schémas directeurs constituant notre échantillon.
Les schémas directeurs étudiés présentent, pour ce premier exercice, des variations importantes au niveau de leurs structures et de leurs durées, reflétant des différences d’amplitudes dans les domaines couverts :
- Structures : deux établissements organisent leur document-cadre en plusieurs parties thématiques génériques (Lyon 1 et La Rochelle) ; d’autres établissements explicitent leurs « ambitions » (Toulouse Jean Jaurès), « orientations » (Paris Cité), « engagements (Strasbourg), « axes stratégiques » (Caen Normandie, Université Paris-Est Créteil) et « objectifs stratégiques » (Université d’Artois).
- Durées : de 3 à 10 ans (Caen Normandie et Strasbourg : 3 ans ; Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne : 4 ans ; Artois, La Rochelle, Paris Cité et Toulouse Jean Jaurès : 5 ans ; Lyon 1 : 10 ans).
Le tableau suivant donne à lire, par établissement, ces éléments de structure et la place (tout aussi variable), qu’y occupent les bibliothèques à travers leurs services de la documentation (SCD) – vous pouvez l’agrandir en zoomant pour vous en faciliter la lecture :

Nous partageons ci-dessous deux extraits des Schémas directeurs ayant mis en avant le SCD de leur université comme service pilote sur les enjeux DDRSE : celui de l’Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne ; celui de Toulouse Jean Jaurès.
Pistes de réflexion et perspectives de développement
Si les bibliothèques sont présentées dans deux schémas directeurs comme des services exemplaires, nous constatons qu’elles sont, pour le reste, encore peu mentionnées de façon explicite de manière globale dans les schémas directeurs DD&RSE analysés. Nous vous proposons donc d’ouvrir la réflexion et d’identifier des pistes de développement pour rendre plus lisible les actions et missions des bibliothèques dans le domaine du développement durable & de la responsabilité sociétale et environnementale.
Les bibliothèques pourraient ainsi être facilement mobilisées sur de nombreux engagements vers la transition écologique des établissements, en particulier sur les axes suivants :
- sensibiliser la communauté universitaire (et du grand public) aux enjeux environnementaux : les BU proposent en effet sur ces thématiques une documentation fiable et variée (ouvrages scientifiques, pratiques ou pédagogiques) et organisent régulièrement différentes animations, de la sélection thématique (bibliographie, table de présentation de documents) à l’action culturelle (exposition, conférence, ateliers)
- agir de manière éco-responsable : souvent centrales sur le campus et très fréquentées, les BU sont le lieu idéal pour sensibiliser à des pratiques écoresponsables, en montrant elles-mêmes l’exemple (réduction et valorisation des déchets, numérique responsable…). Elles participent évidemment aux stratégies immobilières de l’établissement et peuvent devenir une vitrine de son engagement (éco-conception de bâtiment, économies énergétiques…)
- impulser, porter et/ou mettre en œuvre des actions de réemploi : étant par définition opératrices de prêt, les bibliothèques peuvent très naturellement être associées au développement ou à la participation aux initiatives de mise en commun et de réemploi. Les exemples de prêt d’objets, braderies ou vide-dressings proposées par des bibliothèques ne manquent pas, permettant à la fois de favoriser l’économie circulaire et de lutter contre la précarité étudiante.
- œuvrer via la science ouverte et la science participative à diffuser des connaissances scientifiques et un avenir plus durable : là encore les BU se positionnent depuis plusieurs années déjà sur le soutien à la science ouverte, en accompagnant les chercheurs dans le dépôt de leurs publications dans les archives ouvertes nationales, en finançant des initiatives favorisant la diffusion ouverte des publications scientifiques, et plus généralement en valorisant auprès du grand public les recherches menées dans les établissements de l’enseignement supérieur et de la recherche, par différentes actions culturelles ou de médiation scientifique organisées sur les campus.
Nous pensons également que nourrir une réflexion croisée avec d’autres outils cadres en lecture publique, tels que les Projet Culturel Scientifique Educatif et Social (PCSES), pourrait être très intéressant. Nous sommes ainsi largement preneurs, au sein de la commission Bibliothèques Vertes de l’ABF, de vos retours d’établissements sur vos documents stratégiques sur les enjeux DDRSE !
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