Espèces d’espaces : les BU en transition, Retour sur le congrès 2024 de l’ADBU

La commission Bibliothèques Vertes de l’Association des Bibliothécaires de France (ABF) vous propose, à travers ce billet rédigé par Isabelle Bontemps et Jean-Marie Feurtet, un retour sur le 53e congrès de l’Association des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation (ADBU) qui s’est tenu les 9 et 10 octobre 2024 au Palais des congrès de Dijon.

La journée d’étude, le 9 octobre, a réuni environ 350 participants autour des enjeux de transition écologique et environnementale, dans l’enseignement supérieur et la recherche (ESR) en général puis plus particulièrement dans les bibliothèques universitaires (BU) et a été suivie le lendemain d’une matinée politique dont nous vous retraçons les grandes lignes ayant trait aux enjeux de développement durable & responsabilité sociétale et environnementale (DDRSE).

Journée d’étude du 9 octobre 2024

Matinée : pilotage DD&RSE et gestion bâtimentaire

Bruno Peuportier, directeur de recherche aux Mines de Paris PSL (centre Energie, environnement et procédés), a ouvert la journée en rappelant la portée stratégique de la question bâtimentaire, puisque près de 40% des émissions globales de gaz à effet de serre proviennent du bâtiment (1/4 des émissions de gaz à effet de serre (GES) à l’échelle de la France). Il a ensuite rappelé que les bibliothèques sont par définition des lieux de réemploi (en émettant l’intéressante hypothèse que leurs rayonnages peuvent, dans certaines conditions d’ancienneté et de conservation, être considérés comme des « puits de carbone » ?), et a proposé d’évaluer la performance environnementale en s’appuyant sur l’analyse du cycle de vie (ACV), qui permet d’identifier clairement les principaux contributeurs. Dans le bilan global de la vie d’un bâtiment, ce sont généralement les usages (énergie « opérationnelle » : chauffage, eau, électricité…) qui prédominent ; il convient aussi de rappeler qu’une rénovation (surtout si elle vise à la passivité) provoquera moitié moins d’émissions de GES qu’une nouvelle construction. Sur la question de l’adaptation au réchauffement climatique, Bruno Peuportier a évoqué les outils de simulation thermique, ainsi que des techniques d’isolation et de protection parfois empruntées au monde animal, comme l’isolation transparente façon poils de l’ours polaire, mise en œuvre à la bibliothèque publique Des Moines (Etats-Unis) ou à la bibliothèque Deichman Bjorvika (Oslo). En conclusion, il a rappelé qu’il était important de mesurer les performances environnementales (consommation d’énergie, températures, humidité, éclairement, déplacements…) en les rapportant au mètre carré utile ou à l’usager effectif.

Les interventions suivantes (CIRSES, Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, ADEME et ARTIES) ont dressé un panorama des différents outils et référentiels existants sur les questions de Développement durable et Responsabilité sociétale et environnementale, de la norme ISO 26 000 au Plan Climat et biodiversité du Ministère, en passant par la plateforme PERSEES consacrée au référentiel et à la labellisation DD&RS des universités et grandes écoles.

Ont ensuite été présentés 3 projets bâtimentaires en bibliothèques universitaires :

  • La rénovation de la BU SHS du campus Pont de Bois de l’Université de Lille, renommée l’Agora, dont l’ouverture est prévue en septembre 2026, qui a des objectifs de performance environnementale importants (baisse de 60% de la consommation énergétique), tout en utilisant des matériaux biosourcés ou recyclés
  • La conception du Learning Center de Mulhouse ouvert en 2020 sur le campus Illberg, accompagnée d’un travail sur l’âme et la sensorialité du lieu (projet répondant à la norme ISO 50 001 et incluant une charte pour la gestion environnementale du site)
  • Les choix de durabilité low tech et « basse maintenance » effectués dans la rénovation de la bibliothèque Belle-Beille à Angers, qui s’efforce de cultiver son attractivité sous la forme d’un « laboratoire de mutualisation et de sobriété » et d’une plateforme de services pour tous, sur le modèle du « living center ».
Vidéo-mapping nocturne sur le Learning center du campus Illberg (UHA, Mulhouse)
Crédits : Pierre Fraenkel

Après-midi : tables rondes et outillages

Les tables rondes ont permis de présenter les outils et actions permettant :

La journée s’est conclue avec le rappel par le Ministère de la Culture de la récente publication Pour un engagement fort des bibliothèques dans la transition écologique, un guide qui dresse un premier état des lieux et recense de nombreuses bonnes pratiques en la matière.

Matinée politique du 10 octobre 2024

La matinée politique, le lendemain de la journée d’étude, s’est penchée sur l’inscription des Services communs de la Documentation (SCD) dans l’archipel des schémas directeurs de chaque université (achats responsables, stratégie immobilière…) et sur la création de dynamiques de gouvernance globales impliquant les métiers et filières dans leur diversité (les exemples des réseaux des économes de flux ou des acheteurs publics ont pu être cités).

Dans le contexte d’un parc immobilier de l’ESR représentant un enjeu d’investissement majeur en termes de rénovation énergétique (16 millions de m² répartis sur près de 7000 bâtiments, dont 1/3 sont dans un état jugé peu ou pas satisfaisants par la Cour des Comptes), les bibliothèques universitaires sont en position d’être, ou attendues comme des vitrines d’exemplarité et des « hubs » centraux sur les campus (y compris pour l’accompagnement à la sobriété numérique, plusieurs fois revenue dans les remarques).

Une intervention du Réseau étudiant pour une Société Ecologique et Solidaire (RESES) a rappelé les préoccupations et attentes très marquées des nouvelles générations en matière de transformation écologique des campus et des parcours de formation, et d’implication dans les décisions à ces égards.

Pour aller plus loin…

N’hésitez pas à explorer la page du congrès pour y retrouver les posters issus de l’appel à contributions sur les initiatives des BU relatives à la transition écologique (dont voici reproduits quelques uns ci-dessous), une bibliographie reprenant l’essentiel des références produites ou évoquées par les intervenants au cours de la journée, sans oublier l’excellente vidéo de promotion des démarches de prêts d’objets en bibliothèque issue du second appel à contributions.

La commission Bibliothèques Vertes de l’ABF a présenté également dans ce cadre un poster, réalisé par Isabelle Bontemps, faisant la part belle à la campagne, en cours, de plaidoyer sur les bibliothèques actrices de la transition écologique où nous invitons les bibliothèques universitaires, au côté de celles de lecture publique, à valoriser leurs démarches écoresponsables sur la carte des bibliothèques ABF et par retour de témoignage :

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