Bibliothèque départementale du Lot (BD46) : penser localement, agir en tous points

Présentation de l’établissement et du contexte

La Bibliothèque départementale du Lot (BD46), service culturel du Département, a pour mission de faciliter l’accès à la lecture et au savoir de plus de 175.000 Lotoises et Lotois. Interlocutrice privilégiée des collectivités territoriales et des équipes salariées et bénévoles de 120 bibliothèques, elle est composée de 20 agents et est implantée sur deux sites (non ouverts au public) à Cahors et à Saint-Céré, de manière à mieux couvrir l’ensemble du territoire du Lot et à y favoriser le développement de la lecture publique.

Ses activités gravitent principalement autour de 4 axes :

  • ingénierie territoriale et accompagnement à la modernisation du réseau départemental
  • acquisition et gestion d’une offre documentaire physique (environ 180.000 documents circulant dans les collections des bibliothèques du réseau) et numérique (Médiathèque numérique du Lot)
  • formation des bénévoles et salariés non qualifiés, formation continue des professionnels du réseau, et participation au programme des groupes et organismes de formation en région
  • impulsion et coordination de dispositifs d’action culturelle, en particulier en direction des publics prioritaires du département (petite enfance, collégiens, personnes âgées, personnes porteuses de handicap, publics de l’insertion).

L’irrigation de tous ces axes par l’écoresponsabilité a d’abord été induite par l’engagement particulier de la collectivité dans une démarche de transition écologique et sociale. Le projet de mandat « Lot A Venir » (2021-2028) conjugue 3 grands objectifs (durabilité, solidarité, attractivité), déclinés notamment en 10 actions en faveur d’un « Lot durable où l’on vit bien » et de son adaptation au changement climatique. 

Extrait du projet « Lot à venir » 2021-2028

En 2023-2024, en partenariat avec le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), un travail de diagnostic spécifique des vulnérabilités du Lot au changement climatique a permis de définir les enjeux d’adaptation auxquels le Lot et ses habitants seront dans les décennies à venir et sont d’ores et déjà confrontés. Dans un territoire dont les activités économiques reposent notamment sur l’agriculture et les services (médico-social, tourisme), singularisé par sa ruralité (4e département le plus rural de France) et sa démographie (2e département le plus âgé de France), et couvert aux trois quarts d’espaces naturels, ce diagnostic met en évidence une exposition plus importante aux impacts sur la santé des plus fragiles et aux modifications du cycle de l’eau. A la suite de ce bilan départemental des vulnérabilités socioenvironnementales, l’un des premiers réalisés en France, un plan d’actions pour 2025-2029 vient d’être finalisé, qui comprend 6 ambitions pour le Département et appelle différentes passerelles avec la politique de lecture publique. L’une des traductions en est la programmation « Lot en transitions », dont l’édition 2025 a ainsi été consacrée aux mobilités alternatives.

Affiche synthétisant le diagnostic des vulnérabilités du Lot aux effets du changement climatique, qui constitue l’un des principaux points d’appui au Plan départemental d’adaptation 2025-2029. Voir également le très complet schéma des chaînes d’impacts réalisé par le Cerema.

Un schéma départemental de la lecture publique tourné vers les transitions

L’effort de mobilisation interne aux agents de la collectivité est porté par des groupes de travail (les « Colibris ») qui œuvrent à la transformation des pratiques professionnelles, ce qui est notamment le cas au sein de la BD46. C’est dans ce contexte de construction et de partage actifs de valeurs qu’a pu intervenir la création d’une mission de référente Transition écologique, chargée de l’animation de l’équipe BD46 et de la veille professionnelle sur ces questions, et participant également à des groupes de travail à plusieurs échelles (département du Lot, région Occitanie, réseaux d’acteurs locaux du livre…). Dégager ce temps dédié, dans les réunions, dans certaines fiches de postes… représente une difficulté classique, mais aussi une condition de réussite.

Durant le travail de conception et de rédaction du Schéma départemental de la lecture publique (SDLP) 2024-2029, les enjeux de transition écologique et sociale ont été définis comme devant être transversaux à toutes les activités et objectifs de la BD46. En tant que document-cadre, le SDLP s’inscrit dans une logique de « management responsable », encourageant notamment la participation des agents comme factrice d’appropriation des enjeux de transitions en interne et auprès des publics (valorisation des compétences des agents pour l’entretien écoresponsable des collections, temps dédiés aux enjeux de la transition écologique dans les ateliers collectifs et réunions de service…). Lors des différents ateliers menés avec les partenaires du réseau des bibliothèques, puis en interne à la BD46, l’impact environnemental est apparu, non plus comme une préoccupation supplémentaire, mais comme le cadre dans lequel l’ensemble des objectifs et des actions identifiées comme prioritaires devaient se déployer. Le SDLP du Lot appuie le plus systématiquement possible ses objectifs sur les Objectifs de développement durable de l’Agenda 2030 : la planification et la mise en œuvre de chaque action fait l’objet d’une réflexion sur son impact environnemental et comprend un volet transition écologique, tandis que les indicateurs environnementaux et solidaires ont été généralisés et mis en évidence parmi les critères d’évaluation. L’organisation des journées départementales, formations et événements de la politique d’action culturelle, comprend ainsi tableaux de covoiturage, repas sur des bases végétariennes et locales, récupération des restes alimentaires, contenants lavables, etc. Autre exemple, l’un des piliers de la politique documentaire (revue en 2025) repose, pour chaque responsable documentaire de l’équipe et vis-à-vis du réseau, sur la notion de sobriété documentaire (entretien et équipement écoresponsables des collections, questionnement de type ACV sur les ressources engagées par la constitution des collections et sur les usages correspondants). 

 

Les quatre piliers de la politique documentaire de la BD46, dont la sobriété documentaire pour une « offre adaptée, désirable et accessible » (extrait de la Charte des collections 2025-2030)

Voici quelques exemples d’actions réalisées ou en prévision figurant dans le SDLP du Lot :

  • incitation aux mobilités douces pour les navettes intercommunales,
  • volet transition écologique dans la formation initiale aux bibliothèques du réseau,
  • plan d’actions en faveur de la sobriété numérique,
  • interventions auprès des élus,

achat responsable, collections dédiées, réduction de l’impact du circuit du livre (équipement, recyclage et partenariat Ammaréal). 

Exemple de fiche action dans le SLDP 46 : les indicateurs environnementaux (en vert) et solidaires (en rose) sont mis visuellement en évidence

L’animation du réseau de bibliothèques autour des enjeux de transition écologique 

En tant que service départemental de la lecture publique, la BD46 se positionne à la fois comme un lieu et point d’appui pour l’expérimentation, et comme un lieu-ressource (sollicitations pour des questions pratiques, l’animation d’ateliers ou de rencontres interprofessionnelles…) pour le réseau des bibliothèques.

Si le point de départ est bien souvent l’intérêt et la réflexivité spontanées des bibliothécaires à l’égard des questions environnementales, le fait que des précédents existent au niveau départemental et alimentent des retours d’expériences ou fiches pratiques, contribue à rassurer et motiver.

Cette fonction « inspiratrice » s’exprime par exemple à l’égard des collections et de leurs usages. Après que la déplastification des collections ait été mise en œuvre à la BD46 (100% des nouvelles acquisitions plastifiées en 2023, moins de 10% en 2025), les bibliothèques du réseau lotois ont pu bénéficier d’ateliers d’entretien écoresponsable des collections : plusieurs d’entre elles ont depuis lors entièrement supprimé la plastification, et d’autres mobilisent les compétences présentes sur leur territoire pour accompagner ce changement d’usages (collecte de tote-bags, atelier de couture pour la réalisation de poches de transport…). Le rôle des référentes de territoire est ici central : elles ont mobilisé l’ensemble des bibliothèques du réseau, quelque soient leurs dimensions, sur des ateliers entièrement dédiés aux enjeux d’équipement écoresponsable. Dans un second temps, celles-ci ont pu garantir à leurs décideurs et à leurs publics le cadre et l’aboutissement de cette action, et agir à court terme. 

Macaron apposé sur les collections durant la phase expérimentale de déplastification

Autre exemple : la propagation du remplacement des cartes de lecteurs en plastique au profit de cartes cartonnées, voire, chemin d’émulation faisant, la suppression des cartes lorsque le fonctionnement le permet. Une action simple qui pose des questions d’accueil, de communication, de gestion de base des utilisateurs…

La BD46 est également un lieu ressource où trouver des outils « clefs en main » adaptables au contexte de sa bibliothèque, simplifiant l’accès à l’information, aux outils et aux ressources. L’exemple le plus évident est l’accès aux ressources documentaires : un fonds spécifique dédié aux enjeux de la transition écologique, une veille renforcée sur les enjeux environnementaux en bibliothèque diffusée au réseau (via notamment un groupe de diffusion) et portant aussi bien sur la littératie écologique (s’informer sur les réalités environnementales en cours et sur les moyens d’agir) que sur le renforcement des imaginaires positifs et les visions d’avenir commun.

Un autre exemple a fait l’objet d’un partenariat avec la commission ABF Bibliothèques Vertes en novembre 2024 : la journée professionnelle de la lecture publique (ayant pour thème « Réinventons nos bibliothèques ») a été l’occasion d’élaborer un outil d’autodiagnostic environnemental pour les bibliothèques lotoises, en se voulant le plus adaptable possible à leurs différents contextes. Cet outil a une double vocation : dresser un état des lieux, mais également prioriser ses actions et les porter auprès des décideurs et décideuses. S’il est mis à disposition librement  et a déjà connu plusieurs réutilisations, il fait aussi l’objet d’ateliers de prise en main, proposés tant par les référentes de territoire que par la référente transition écologique de la BD46. Les ateliers d’accompagnement des bibliothèques dans la conception et la rédaction de leur Schéma intercommunal de lecture publique, d’une durée de 3 jours, sont aussi un moment essentiel pour mentionner leurs engagements environnementaux dans ce document programmatique (voire en faire un axe structurant).

Garder le cap et la méthode pour progresser collectivement

Le Schéma lotois de lecture publique joue un rôle essentiel en asseyant le caractère global de la démarche de transition écologique de la BD46, en priorisant et en évitant les effets de dispersion. Point d’appui de la conduite du management responsable, il exemplifie le déclic de transformation, qui conduit non plus seulement à se demander quelles actions chaque service peut mener pour réduire l’impact environnemental de ses activités, mais surtout à replacer chaque projet ou approche en phase avec les impératifs d’atténuation et d’adaptation climatiques, en garantissant l’équité de traitement des usagers et la préservation des ressources. Les temps de partage collectifs préalables à sa rédaction et créant de l’émulation parmi l’équipe et les partenaires, le choix de consacrer du temps dans les fiches de poste et en réunions, ont permis d’éviter de faire de l’écologie un supplément d’âme déconnecté de la stratégie d’établissement et de réseau, mais bien l’un des sens profonds de chaque pan d’activité où elle s’insère. En plus de résistances ou d’anxiétés qui subsistent, l’une des difficultés au quotidien reste de « dézoomer » et de (se) rappeler qu’un écogeste n’a guère de valeur en tant que tel, mais s’intègre dans une entreprise globale et de plus longue haleine. Même s’il existe des résistances ou de l’anxiété au sein d’une équipe, il y a la possibilité de faire un lien avec ce qui a du sens dans notre travail.

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